Les guérisseurs traditionnels jouent un rôle important en Afrique subsaharienne, car ils sont souvent les premiers à prodiguer des soins de santé dans les pays à revenu faible et leurs zones rurales reculées. Ceci est le cas au Ghana, où, on ne comptait, en 2021, que 52 chirurgiens en traumatologie et orthopédie pour une population de plus de 30 millions d’habitants.
« Au Ghana, le taux de gangrène et d’infection des membres, de handicaps et de décès liés aux guérisseurs traditionnels est alarmant, en particulier chez les enfants», déplore le Dr Dominic Konadu-Yeboah, enseignant pour l’AO Alliance et chef du service de traumatologie et d’orthopédie de l’hôpital universitaire de Komfo Anokye (Komfo Anokye Teaching Hospital – KATH) à Kumasi, au Ghana.
L’AO Alliance a lancé sous sa direction, en 2021, un programme de cours destiné aux guérisseurs traditionnels du Ghana, dans le but de prévenir les complications liées à leurs traitements et d’éviter des handicaps à vie grâce à des événements éducatifs sur le traitement des fractures.
Impact
Avec une équipe de collecteurs de données locaux, sous la supervision du Dr Yeboah, l’AO Alliance a identifié et recruté des guérisseurs traditionnels pour participer au programme dans trois régions du pays : l’Ashanti, le Nord et le Nord-Ouest. Depuis avril 2021, six événements éducatifs ont été organisés avec une équipe de chirurgiens et d’enseignants locaux. 197 guérisseurs traditionnels venant de Kumasi, Tamale et Wa y ont participé.
En plus des conférences données par des chirurgiens en traumatologie et orthopédie expérimentés, des discussions en petits groupes et des exercices pratiques, des visites d’hôpitaux universitaires ont été organisées, afin de montrer aux participants des méthodes contemporaines pour le traitement des fractures. Les exercices pratiques étaient spécialement conçus pour les guérisseurs traditionnels et utilisaient des outils locaux adaptés pour mieux correspondre aux normes cliniques modernes de stabilisation des fractures.
Les données de l’hôpital universitaire de Tamale (Tamale Teaching Hospital – TTH) et du KATH révèlent une augmentation des patients référés par des guérisseurs traditionnels pour la période d’avril 2021 à avril 2022 et une diminution de 57 % des amputations liées à leurs traitements depuis le début des cours.
Les formations ont été si bien accueillies par les guérisseurs traditionnels, qu’ils ont créé des associations – une pour chacune des trois régions – avec l’aide de l’AO Alliance et de ses partenaires locaux (TTH et KATH). En juin 2022, plus de 200 guérisseurs traditionnels avaient rejoint les associations. Lorsqu’une complication liée à un de leurs traitements est enregistrée à l’hôpital, l’équipe du projet en informe les responsables de l’association, qui recherchent alors le responsable, lui enseignent la manière de prévenir ce type de complication, puis l’inscrivent à l’association.
« J’ai décidé de suivre ce cours de l’AO Alliance pour améliorer ce que je faisais. J’ai beaucoup appris. Je voudrais remercier l’AO Alliance d’avoir proposé cette formation aux guérisseurs traditionnels et pour la collaboration avec les hôpitaux. Si nous ne pouvons pas traiter des cas compliqués, nous les envoyons à l’hôpital pour un traitement complémentaire », a déclaré Yussif Abudu Babia, guérisseur à Gwolu.
Reconnaissance
Le Dr Yeboah a écrit, avec son équipe, un article en anglais sur le programme, intitulé : « Training Traditional Bonesetters in Basic Principles of Fracture Treatment: A Proof of Concept », qui a été sélectionné pour une bourse d’études humanitaire 2022, attribuée par l’Association de traumatologie orthopédique (Orthopaedic Trauma Association).
Légende de l’image: Des guérisseurs traditionnels apprennent les techniques de la pose d’attelles pendant le cours de l’AO Alliance sur les principes de base du traitement des fractures à Wa, au Ghana.